En marge du vieux système, la jeunesse Algérienne crie son désespoir sur YouTube, se résigne ou tente de s’inventer un avenir. Il est vrai que jamais un chef d’État n’avait régné aussi longtemps sur l’Algérie. Avant lui, Houari Boumediene détenait le record de longévité avec treize années d’exercice du pouvoir. Le raïs était mort dans une aura de mystère. Son décès à l’issue d’une longue période de coma fut annoncé le 27 décembre 1978. Le surlendemain, un certain Abdelaziz Bouteflika, alors inamovible ministre des Affaires étrangères et chantre du tiers-mondisme, prononça son oraison funèbre au cimetière d’Elia. Il fut évincé de la succession par les hauts dignitaires du régime et condamné à une interminable traversée du désert avant d’être rappelé par le « cercle des décideurs » pour remporter l’élection présidentielle de 1999. L’Algérie émergeait d’une sanglante guerre civile entre le régime et les islamistes, sorte de répétition générale du chaos dans lequel a glissé une partie du monde arabe.
Agé de 81 anset affaibli par les séquelles d’un accident vasculaire-cérébral remontant à 2013, qui ont affecté son élocution et sa motricité,Bouteflika, règne sur un peuple à la fois turbulent et résigné depuis bientôt 20 ans. Le temps pour une génération de grandir tandis que son président se recroqueville. Malgré de graves problèmes de santé et des hospitalisations à répétition, Bouteflika est… candidat à sa propre réélection. Il briguerait alors son cinquième mandat à la tête d’un pays rongé par la corruption et le clientélisme.Avec la baisse du prix du pétrole et la dégradation évidente de la santé du chef de l’Etat, les tensions sociales augmentent, le pays tourne au ralenti et rien ne semble avancer. De plus, dans un pays où le pouvoir est plutôt opaque, le président est devenu une ombre ; en effet, le président ne fait plus que de rares apparitions et ne s’exprime plus en public.
Aujourd’hui,l’Algérie se trouve dans une impasse politique et nombre de ses habitants semblent découragés. Il est vrai que l’économie algérienne repose quasi-exclusivement sur les exportations d’hydrocarbures. Mais le gaz naturel et l’or noir, au lieu de bénéficier à la population, servent à soutenir le pouvoir. Dans ce contexte, Bouteflika et ses acolytes forment un système qui contrôle la vie politique et entretient la corruption et le népotisme. Les profiteurs de ce système sont ceux qui détiennent le pouvoir. De leur point de vue, il n’y a donc aucune raison de changer le statu quo.Bouteflika a réaménagé tout l’édifice politique, social et économique en fonction des nécessités du pouvoir absolu.Il a agi sur la hiérarchie militaire, effectué les changements d’hommes nécessaires, de façon à installer à tous les niveaux de décision des hommes qui lui sont ‘acquis’. Il a démantelé l’État pour l’objectif unique et essentiel de rester au pouvoir. Désormais, il n’y a plus d’autorité, d’institutions étatiques viables. L’Algérie est un pays sans État, livré à la prédation et à la corruption.
Le bilan de Bouteflika est révélateur d’une culture de management autoritaire et népotique ; en 19 ans, il a mis le pays à genoux. La monnaie nationale ne cesse pas de se dévaloriser. Le pays importe tout ce qu’il consomme et ne produit quasiment rien, hormis les hydrocarbures. Ce pays vit sur la « planche à billets ». Il n’y a pas de projet économique. Même le FMI se dit préoccupé par le taux de chômage du pays. Bouteflika a créé une chimère, une illusion. L’Algérie est dirigée par de groupes très puissants, qui ne veulent pas avoir des comptes à rendre, ni se retirer de leur position privilégiée au cœur du pouvoir. Parallèlement, la corruption a atteint un niveau inimaginable et elle a progressivement entravé toute tentative de changement. Le pays est en perte totale de souveraineté autant que de vitalité sur le plan économique, politique et sociétal.
Le président n’est presque plus en mesure de gouverner le pays et les tensions s’accumulent. En même temps, on doit se demander : ‘Qui sont ces forces qui tirent profit du handicap d’Abdelaziz Bouteflika’ ?‘Qui dirige le pays en vérité’ ? Pour quels intérêts ?’ ‘ Qui a intérêt à le laisser au pouvoir pour un cinquième mandat’ ? Peu le savent. En tout cas, il y a une seule certitude : l’Algérie se dirige tout droit, comme l’a tweeté le journaliste NadjibBelhimer, vers des « funéraillesprésidentielles ».
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